Un troisième numéro
autour d’une question:
que nous réserve l’avenir?

Il n’y a aucune perspective, aucun bilan, aucune manière de résumer à quel point cette année nous a éprouvés. Une année marquée par une pandémie mondiale et par un été empreint de deuil, de colère et d’insurrection. Le travail extraordinaire des organisations Movement for Black Lives et Black Lives Matter nous a tirés de l’isolation de nos foyers et menés dans les rues pour nous élever contre le suprémacisme blanc, le racisme anti-Noirs, la violence anti-trans et la brutalité policière. Être un·e véritable allié·e implique un large éventail de travail, d’être présent·e à tous les niveaux: de l’échelon local à l’échelon planétaire, de l’échelon individuel à l’échelon structurel.

Pas de résumé, donc – juste davantage de travail à accomplir. Avec du recul, les taches aveugles irréparables de notre histoire sont mises au jour et comme toujours, ce que la crise révèle n’est en fait une révélation que pour ceux qui n’étaient pas attentifs. Comment ces questions cruciales nous accompagneront-elles dans la nouvelle année? Ces connexions génératrices, cette entraide, ces moments de réflexion au cœur de l’urgence? Nous le savons bien: l’art est indissociable de l’agitation, et toute vision a besoin de voix courageuses, de ces points de vue propulseurs qui font bouger les choses et redéfinissent notre avenir.
C’est à cela que nous avons consacré le troisième numéro de notre magazine, et ce, dès la couverture. Nous y avons mis à l’honneur le dramaturge et polymathe Jeremy O. Harris, dont les productions Slave Play et «Daddy», ont fasciné le public et les critiques. Plus encore: elles ont créé une dépendance à sa façon de créer le malaise, à sa manière de remettre en cause la blancheur, l’hétérosexualité, les privilèges et la prétendue immunité que conférerait la bonne volonté. Comme l’écrit Doreen St. Félix, «Harris (…) est devenu – et a peut-être même défini, pour notre nouveau siècle, une catégorie de célébrité culturelle.» Harris a attendu Rihanna pour lever le rideau, a conclu des ententes avec A24 et HBO, est devenu la muse de Gucci et de Bode; il s’est imposé comme une vedette montante, quelque part entre l’ordre établi et l’avant-garde.
Chaque page de ce numéro a été créée de A à Z et conçue pour être un document incomplet, laissant une place à ce qui nous attend. Les articles nous invitent à contempler le passé comme à regarder vers l’avenir. Et n’est-ce pas là tout l’objectif? Prêter attention, écouter et immortaliser notre présent pour s’y replonger un jour.