L’autodidacte Saweetie roule en Gucci

Née à Hayward, en Californie, Saweetie grandit dans la Baie de San Francisco et à Sacramento, puis, pour poursuivre ses études à la USC, elle déménage à Los Angeles, où elle vit toujours. C’est ici qu’elle bâtit sa carrière musicale. Elle est à la fois ambitieuse et humble pour un sex-symbole – pour une Marilyn Monroe moderne. Comme son nom de scène le suggère, elle a cette aptitude à être à la fois relaxe et charmante, une vraie Californienne. Elle semble tout aussi à l’aise de rapper dans sa cuisine en vêtement sport confortable dans le teaser de «High Maintenance» qu’elle a publié sur Instagram, que lorsqu’elle est tirée à quatre épingles pour les séances photo. Son perfectionnisme la suit dans tout ce qu’elle fait. C’est d’ailleurs ce que «high maintenance» signifie pour elle, l’excellence.

Elle attribue le succès populaire de «Icy Grl» au «bouche-à-oreille, parce que ça s’est fait de façon tellement organique, explique la rappeuse. Honnêtement, ça a juste explosé tout seul. Je ne m’attendais pas à ce que ça soit si gros». Elle appartient à cette nouvelle génération de rappeurs qui s’est fait connaître en ligne. «Les médias sociaux ont remplacé la rue, affirme-t-elle. Plutôt que de distribuer ta compilation au coin de la rue, tu la publies en ligne, et c’est comme ça que les fans y accèdent». Saweetie se souvient d’une époque pas si lointaine où elle faisait tout en ligne elle-même, sa promotion et ses lancements. «Chaque jour, je vérifiais sur Soundcloud le nombre d’écoutes, maintenant, je ne le regarde même pas». Elle s’interrompt, sourit, puis ajoute: «C’est fou». Elle ne se considère pas comme une rappeuse Soundcloud; on ne confondrait jamais sa musique à celle du «rappeur Soundcloud» – visage tatoué, rap emo – comme on se l’imagine aujourd’hui. Elle a néanmoins émergé de cette plateforme, où la relation directe au consommateur l’a aidée à bâtir une communauté de fans fidèles. «Tu peux tester ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas», résume Saweetie.

Entre les festivals, les vidéos et les enregistrements en tant qu’invité avec des artistes tels que Zaytoven ou Dua Lipa, elle a fait ce qu’elle appelle «un petit caméo» sur Quavo Huncho, le premier album de Quavo. Saweetie est cependant restée évasive en ce qui concerne les rumeurs voulant qu’elle fréquente Quavo. Ils ont en effet plus d’une fois été vus ensemble. Quavo a d’ailleurs publié une magnifique photo d’eux en contre-jour sur son Instagram et elle était hier à l’extravagante soirée de lancement de Quavo Huncho. Elle a malgré tout réussi à avoir une bonne nuit de sommeil, et son visage s’illumine quand elle parle de la fête. «C’était génial, dit-elle. Très théâtral. Dans la pièce, il y avait différentes scènes avec différents arrangements qui, à mesure que l’album jouait, étaient révélés un à un, le rideau tombait. C’était une expérience».

Si certains pseudonymes de rappeurs sont une façon d’exprimer d’autres aspects de leur personnalité, Saweetie dit d’Icy Grl: «C’est juste moi. Je suis authentique». Le naturel côtoie le flamboyant, c’est très représentatif de la Baie de San Francisco. Saweetie est d’accord. «Je sais pas pourquoi, on voit la différence dans la Baie. Il y a toutes sortes de personnalités uniques. C’est vraiment un endroit spécial. Je pense que venir de là influence ma personnalité, et je ne sens pas le besoin d’avoir un alter ego. Je suis juste moi». Avec d’autres artistes féminines comme Kehlani, qui était artiste invitée sur un remix de «Icy Grl», Saweetie appartient à une vague d’artistes de la Baie qui fait évoluer le rap californien et qui fait une sorte d’hommage au Hyphy, avec des rythmes rapides. «J’ai essayé d’intégrer ce son de la Baie parce qu’il est si unique, si entraînant, et la basse est toujours dingue».

Maintenant qu’elle est connue, les gens essaient de la comparer à d’autres rappeuses. «Ça se fait, c’est comme ça. Je ne l’alimente pas, parce qu’il n’y a pas de raison de le faire». Quand je lui parle des critiques qui la trollent sur les médias sociaux, elle dit: «Les gens prennent du temps de leur journée pour faire ça, ils doivent vraiment être malheureux. Elle ajoute, honnêtement, j’aime les médias sociaux. Mais ça montre comme les gens sont étranges». Et, avec un nouveau projet sur le feu, elle ne peut se permettre de prendre une pause d’Internet.

La musique de Saweetie a les qualités de la musique de la côte ouest, qui s’étend de L.A. à la Baie: ça bouge. C’est parfait pour faire de la route. «Je suis une excellente conductrice, dit-elle en souriant. Je pourrais piloter un véhicule en fuite». Elle est enthousiaste à l’idée de peut-être conduire l’une des voitures rétro garées à l’extérieur pour la séance photo. Elle a rappé sur les beats de Too Short. Elle partage le caractère énergique, mais toujours cool du meilleur rap de la côte ouest. Comme toutes les Californiennes, elle a une très grande estime d’elle-même et ne voit pas le fait qu’elle aime crier «bitch» aux côtés de Too Short comme une contradiction. Saweetie est peut-être la version féminine des rappeurs machos et arrogants, mais elle n’a pas honte d’être vulnérable dans ses textes, comme quand elle dit qu’il vaut mieux quitter les hommes qui ne nous méritent pas pour ceux qui nous méritent.

Molly Lambert est une rédactrice de Los Angeles