Désintox numérique

Le luxe de la déconnexion

  • Images gracieusement fournies par: Carl Burton

Tout commence avec ce petit bruit, cette vibration dans votre poche qui vous dit qu’il se passe quelque chose. Vous prenez votre téléphone, répondez au texto de votre chéri(e), puis revenez à ce que vous étiez en train de faire. Mais ça recommence. Bzzz. Quelqu’un d’autre a commenté ce post. Bzzz. Votre photo a un autre Like. Vous essayez de vous remettre à la tâche. Onze minutes ont passé et chéri(e) n’a toujours pas répondu. Alors, vous êtes déconcentré?

Multipliez l’un de ces moments par 150: c’est le nombre de fois qu’on consulte notre téléphone à chaque jour – et si on est vraiment accro, ce total peut atteindre les 900 fois. Soit une fréquence entre toutes les dix minutes et toutes les six secondes. On peut ainsi cumuler quotidiennement un incroyable total de trois heures les yeux rivés sur un écran de 12 centimètres.

C’est trop? Voici la désintox numérique. À la base, il suffit d’éteindre ses appareils pendant quelque temps. On peut l’envisager comme une cure de juicing mentale, ou encore comme l’équivalent numérique de la très populaire méthode de “désencombrement” de Marie Kondo. Choisir ce que l’on fait de son temps aussi soigneusement que l’on sélectionne ses biens matériels est une progression logique pour quiconque apprécie le minimalisme en mode ou en design, ou celui qui cherche simplement à se détendre. Que ce soit pour une journée ou une semaine, à la maison ou dans un spa à l’autre bout du monde, le fait de taire momentanément ce flux incessant d’informations peut nous rappeler tout à coup ce que veut dire « qualité de vie».

Pour Orianna Fielding, auteur et fondatrice de la Digital Detox Company, c’est un déménagement de Londres vers la Costa Brava, région rurale du nord-est de l’Espagne, qui a mis en perspective sa dépendance à la technologie. « Plus j’étais connectée numériquement, plus je me sentais paradoxalement déconnectée de mon environnement immédiat, parce que ma vie virtuelle ne m’offrait aucune nourriture spirituelle. C’était un bruit de fond constant qui m’empêchait de trouver le rythme et la mélodie propres à mon quotidien. »

« J’observais mon entourage, mes amis et mes collègues, et j’ai réalisé qu’on se donnait rendez-vous pour déjeuner à la plage où chez l’un d’entre nous pour finir tous obnubilés par nos téléphones, en oubliant la présence des autres ou la beauté du paysage », poursuit-elle. Cette révélation la pousse à entreprendre des recherches sur la dépendance numérique, qui menèrent à la publication de son livre UNPLUGGED: How To Live Mindfully In a Digital World. Elle fonde ensuite la Digital Detox Company, où elle dirige des retraites, des séminaires et des cours déconnectés dans un hôtel champêtre du Hampshire, en Angleterre. Parmi ses outils, on retrouve le yoga, les traitements spa et les massages aux cristaux. Mais l’essentiel, c’est de redécouvrir comment vivre dans l’instant présent, loin de toute distraction.

« La déconnexion donne le temps d’agir sereinement, de façon “mono-tâche”, en se concentrant sur une seule activité à la fois », explique Fielding. C’est cette lucidité et cette attention, en plus de l’introspection que peut offrir un moment de solitude, qui vous aidera à vous “réintoxiquer” avec un regard neuf.

En retrouvant votre téléphone, la première étape est de le soupeser dans votre main, d’observer le mouvement des doigts qui le déverrouillent. Une plus grande conscience de ces gestes vous aidera à ne pas regarder votre téléphone par automatisme. Ensuite, Fielding prône une meilleure gestion du temps. Désactivez les alertes, puis réservez un moment précis de votre journée pour consulter vos emails et réseaux sociaux. Ne laissez pas votre téléphone sur la table de chevet, et ne le vérifiez pas pendant les repas. Utilisez ces derniers pour passer du temps avec des amis plutôt que de leur parler via messagerie Facebook. Et arrêtez de vous en faire pour 17 minutes sans nouvelles de chéri(e) – il ou elle finira bien par répondre à votre texto.

« La déconnexion donne le temps d’agir sereinement, de façon “mono-tâche”, en se concentrant sur une seule activité à la fois »

—Orianna Fielding

Le dernier conseil de Fielding est peut-être le plus difficile à mettre en pratique. « Concentrez-vous sur un moment privilégié pour l’inscrire dans votre mémoire, plutôt que de le passer à prendre des photos et à les mettre en ligne. » La satisfaction d’être entièrement présent pour profiter d’un café, d’une séance d’exercice ou d’une sortie est bien plus grande que la satisfaction de le montrer à ses abonnés Instagram. Eux mêmes comprendront vite que la meilleure façon de partager les moments du quotidien, c’est de les garder pour soi.

Si vous n’avez pas le temps de vous déconnecter, prenez quelques instants pour méditer devant les illustrations que nous avons commandées à l’artiste numérique Carl Burton – notre propre micro-désintox informatisée. Concentrez-vous sur leurs mouvements fluides et apaisants, et prenez le temps de découvrir ce qui vous vient à l’esprit quand vous n’avez besoin de penser à rien.

  • Images gracieusement fournies par: Carl Burton