SSENSE x Off-White

  • Film: Pierre Debusscher

Découvrez BEFORE and AFTER, une collection capsule unisexe exclusive issue d'une collaboration entre SSENSE et Off-White, révélée par un film de Pierre Debusschere et un entretien avec Virgil Abloh, directeur de création.

BEFORE and AFTER


Une collection capsule unisexe exclusive

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SSENSE Exclusive Blue & Purple Tie-Dye Tote

SSENSE Exclusive Blue & Purple Tie-Dye T-Shirt

SSENSE Exclusive Blue & Purple Tie-Dye Backpack

SSENSE Exclusive Red & Orange Tie-Dye Hoodie

SSENSE Exclusive Blue & Purple Tie-Dye Coat

SSENSE Exclusive Blue & Purple Tie-Dye Cap

SSENSE Exclusive Red & Orange Tie-Dye T-Shirt

La résonance d’une idée


Virgil Abloh lève le voile sur la création

Fermez les yeux et prononcez les mots « directeur artistique », et la première image qui vous viendra en tête est celle de Virgil Abloh. L’ancien architecte, DJ international et créateur de la ligne de streetwear montante Off-White aime ce titre justement parce que, en ses propres mots, « c’est un passe-partout qui permet de faire un peu de tout. » Il n’est donc pas étonnant que Before and After, la collection capsule qu’il signe en exclusivité pour SSENSE, ait été développée non seulement comme un concept vestimentaire, mais aussi comme une expérience médiatique à plusieurs niveaux. Regardez le film, réalisé par Pierre Debusschere, et vous comprendrez.

Joint par téléphone depuis Coachella, Abloh parle librement d’inspiration, d’idées, des frontières mouvantes du zeitgeist, et du pouvoir de la jeunesse. Bref, de tout.

SSENSE

Virgil Abloh

Commençons par le début : parlez-nous de l’origine de ce projet.

Virgil Abloh: L’origine de ce projet, pour moi, a été l’occasion de faire quelque chose de nouveau. La collaboration avec SSENSE a commencé avec un email. Je me suis dit: pourquoi ne pas créer une collection capsule? J’aurais pu envisager ce projet de façon plus machinale, mais j’y ai vu une occasion unique de collaborer avec Pierre Debusschere sous l’égide de SSENSE. J’adore le travail de Pierre, et j’admire son univers créatif depuis longtemps. J’ai donc voulu mettre cela de l’avant, plutôt que de simplement faire des vêtements puis tourner une vidéo à leur sujet.

Je voulais entremêler nos deux points de vue, que le résultat soit une collaboration entre lui et moi autant qu’un projet spécial pour SSENSE. Les vêtements ont été conçus comme la moitié d’un tout, dont l’identité complète ne serait révélée qu’une fois le film terminé. Et c’est le concept non seulement du film, mais aussi des vêtements. J’ai travaillé sur les silhouettes, les matières et les détails, et puis, à travers le processus de réalisation du film, la couleur est appliquée. Il y a plusieurs niveaux d’inspiration derrière cela, mais le premier est l’idée qu’à travers ce processus, on obtient un effet de couleur. Et on comprend pourquoi en regardant le film.

J’aime le fait que les vêtements et le film saisissent tous les deux un moment de transformation. Ça pourrait servir de métaphore à beaucoup de choses différentes.

Oui. L’idée de cristalliser une énergie. Mais aussi, et c’est un principe fondamental de mon travail, j’aime démystifier le processus de création, dans l’espoir d’inspirer les jeunes et les autres générations, les précédentes et les suivantes. C’est une fenêtre sur ma méthode de travail, pour que vous puissiez vous projeter ou vous représenter à l’intérieur de celle-ci. J’ai toujours aimé voir le making of en plus de la version définitive d’un film, ou voir la version du réalisateur: apercevoir ce qui se passe en coulisses d’un tournage contribue au rêve. C’est ce que j’aime de ce projet: son titre « Before and After », et le fait qu’on puisse voir le processus de création en même temps que le produit fini.

C’est une dimension très intéressante.

Au départ, c’était un projet qui aurait pu rester en surface. Et je suis fier du fait qu’on ait réussi, à force de dialogue, de talent et de patience, à parvenir à quelque chose de plus riche.

The clothing was created at a 50% capacity, and only after we did the film would the 100% identity of the clothing be finished.

La volonté d’apporter cet effort supplémentaire explique bien l’ascension rapide qu’a connue Off-White. Après seulement quatre saisons, vous êtes finaliste du Prix LVMH pour les jeunes créateurs de mode. Votre point de vue connaît vraiment une résonance particulière.

Ce genre de chose n’est qu’un encouragement. Je ne suis que l’un des millions de jeunes qui rêvent d’être créateurs. Je ne sais même pas ce que ça veut dire! Tout ce que je sais, c’est que j’essaie de présenter ce qui se passe dans ma tête de façon très succincte et crédible. J’essaie de me prouver à moi-même que je suis un créateur. Pour moi, c’était un mot tellement sacré qu’il paraissait hors d’atteinte. Je me méfie donc toujours de me reposer sur mes lauriers, où même de me fixer des objectifs trop précis. J’aime qu’une idée puisse résonner. Le fait même qu’elle résonne, qu’elle ait une place au sein de la culture actuelle m’encourage. Que ça continue à marcher ou non à l’avenir, je vais continuer à travailler sur ces mêmes idées.

Selon vous, la mission d’Off-White est d’occuper l’espace entre le streetwear et le prêt-à-porter de luxe. C’est un espace très pertinent en ce moment.

Culturellement, je crois que c’est là que nous en sommes. Dans l’histoire de la mode et du prêt-à-porter et de ce que les gens portent réellement, ce nouveau créneau est apparu. Je dis souvent que c’est ce les gens aiment porter pour aller bruncher. [Rires] Bruncher ou faire du shopping. Ce que les gens portent pour faire du shopping, acheter d’autres vêtements, ou ce qu’ils portent à un brunch entre amis est en quelque sorte l’aspect le plus intéressant de la mode actuelle.

Il y a aussi l’ère du street style, et le fait que ce qu’on porte à l’entrée des défilés est tout aussi pertinent que les vêtements qui défilent fait en sorte que les gens sont fiers d’exprimer leur style personnel. Ça m’inspire énormément. Et il se trouve que j’ai grandi pendant l’avènement du streetwear: les débuts du t-shirt graphique de skate, les débuts de la culture streetwear japonaise, les débuts de la scène new-yorkaise du Lower East Side. Comme c’est ma génération, et comme je m’intéresse à d’autres domaines de création que la mode, il est naturel que je me positionne ainsi.

Même si vous visez à amener le streetwear dans un contexte de luxe, le luxe semble en même temps s’inspirer beaucoup du streetwear. Les défilés de certaines grandes marques s’articulent autour du t-shirt imprimé, et le calendrier des collaborations et des projets spéciaux partagent cette mentalité de l’édition limitée.

C’est le climat actuel. C’est la façon de s’habiller des gens, ce qu’ils achètent. Je trouve ça admirable. Cet état des lieux a été une motivation supplémentaire dans ma décision de lancer ma marque au moment où je l’ai fait, et à ce rythme: parce que je veux avoir une présence parmi toutes ces jeunes marques. Je suis fier de mes détaillants, particulièrement de SSENSE, simplement de figurer dans cette liste de créateurs, et que les clients puissent découvrir mon travail auprès de ce que je considère être les marques et les créateurs les plus pertinents sur le marché, ceux qui font exactement ce que vous dites, qui sont ancrés dans cette culture. Toute personne qui vit, respire et regarde par la vitre de son Uber sait que c’est la culture du moment. Le zeitgeist a établi de nouvelles frontières.

Pensez-vous que le public a une relation plus authentique avec les marques de skate et de streetwear qu’avec les marques de luxe ?

Je pense que c’est la même relation, mais qu’elle touche une autre région du cerveau. On observe actuellement une convergence d’individus qui aiment mélanger les deux, ce qui exprime davantage leur personnalité que de porter une seule marque de la tête aux pieds. Les vêtements qu’on choisit de porter parlent en notre nom, ils disent « je porte la marque X, j’ai donc certaines valeurs. » Et en les mélangeant, on obtient une sorte de cocktail qui nous représente. L’identité que j’ai définie pour Off-White est déjà un cocktail. C’est un peu plus aléatoire, mais c’est très actuel. Des vêtements pour homme et pour femme, et des meubles. Un style de vie jeune avec un certain niveau d’appréciation pour les objets.

Cette collection en particulier fait penser à un uniforme, mais un uniforme personnalisé. Ce sont des pièces utilitaires avec des rayures diagonales, mais le traitement de teinture en fait des pièces uniques.

Je suis constamment inspiré par les travailleurs, les cols bleus. Si on se rend dans une usine ou dans l’atelier d’un mécanicien par exemple, ils portent tous la même chose, mais ces vêtements sont tous usés d’une façon légèrement différente. Cela s’applique à un contexte plus large: d’une certaine façon, on est tous les mêmes. L’expérience nous donne l’impression d’être différents, mais on reste quand même tous pareils. Les hommes et les femmes aussi: la collection est unisexe par nature. Par choix, devrais-je dire.

Anyone that’s living and breathing and looking out of an Uber can feel that this is the current culture.

On peut aussi envisager l’aspect utilitaire, fonctionnel comme une redéfinition du luxe. Une sorte de luxe furtif.

Je crois que le mot « luxe » a une autre signification aujourd’hui qu’il y a dix ans. Auparavant ce mot ne voulait dire qu’une seule chose. Mais aujourd’hui, non seulement on peut voir un gamin lancer Instagram et devenir richissime, mais je crois qu’il y a aussi moins d’obstacles sociaux dans le mot « luxe ». Mon type de luxe préféré est un luxe usé, patiné. Luxe ne veut pas forcément dire neuf ou impeccable ou riche. Il y a plusieurs types de luxe.

Un autre aspect de la question, c’est que les gens s’habillent de façon plus fonctionnelle aujourd’hui. Le rituel de se changer cinq fois au cours d’une journée n’existe plus.

Oui, on ne peut pas dire qu’on va à des soirées en tenue de cérémonie de nos jours. On brunche. [Rires] La cérémonie du brunch. Un luxe décontracté.

Est-ce ce à quoi on peut s’attendre pour le Printemps-Été 2016 ?

Oui, c’est une bonne idée! C’est peut-être la deuxième collection capsule pour SSENSE.

Même dans les collections Automne-Hiver, je perçois une évolution qui met davantage l’accent sur les matières et la fabrication, et des catégories de produit comme le tailleur et la chaussure, et moins d’emphase sur le branding graphique.

C’est l’évolution naturelle que j’ai toujours envisagée. Dès mes premières collections, j’ai voulu éviter d’être mis dans une case. Mais je me serais alors moi-même mis dans une case si j’avais pu anticiper le développement de la marque. Le fait d’avoir une véritable opinion sur la silhouette, la coupe, les matières et le concept demande des ressources qui peuvent se retrouver confinées à des t-shirts imprimés, des sweat-shirts imprimés, et des shorts avec un imprimé à l’entrejambe.

Le plan pour Off-White est établi sur dix ans, et pour l’instant on ne voit qu’une année et demie de cette chronologie. Alors comme j’espère relever de nouveaux défis dans la conception des collections et la croissance de la marque, et me prouver à moi-même que je peux continuer à développer l’idée qui est à son origine, je vais toujours prendre de nouvelles directions. Ou encore revenir en arrière. Je vois ça comme la liberté, la liberté créative: celle d’évoluer, mais en me donnant la possibilité de revenir à ce qu’on attend de la marque.

Cette liberté d’évoluer semble étroitement liée à votre credo pour Off-White: « la jeunesse l’emportera toujours. » Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet ?

Ça décrit tout simplement l’esprit de rébellion de la génération qui se trouve juste derrière vous. Ou votre assistant, peut-être? [Rires] Ou le stagiaire qui est embauché. Ils ne sont pas forcément embauchés uniquement pour être votre assistant, ou pour la vie. Pour moi, la marque est une manière de rester jeune. D’être sur une sorte de tapis roulant, toujours en train de réfléchir et d’être inspiré. J’y crois, c’est pour cela que j’en ai fait ma marque. À travers tous les projets qu’on réalise, on s’entoure de jeunes talents et on les encourage, parce que d’une certaine manière je suis comme les marques centenaires qui me précèdent: j’essaie d’offrir de nouvelles options. Mais on n’y arrive qu’en travaillant avec des jeunes.

J’ai entendu parler d’une théorie sur l’origine des tendances, qui avance que les créateurs dessinent essentiellement pour les gamins de cinq ou six ans leurs aînés qu’ils trouvaient cool quand ils étaient plus jeunes. Les amis du grand frère, la jolie babysitter, peu importe. Et quand ils arrivent à l’âge adulte et peuvent prendre part au dialogue culturel, ils ramènent une tendance comme le grunge des années 90 dans les années 2000 parce que c’est ce qui leur paraît cool. Mais vous semblez adopter la stratégie inverse: vous tourner vers des gens plus jeunes que vous.

Oui, c’est peut-être pour ça que je suis ici en ce moment! [Rires] Ces-jours-ci, ma devise est « j’essaie de revenir à une version de moi-même à 17 ans. »

Vous étiez comment ?

Je portais des jeans amples, comme aujourd’hui. Je m’intéressais au skateboard. Mes amis et moi, on aimait tous le graffiti, on dessinait sur nos sacs à dos, on écoutait du Nirvana, on écoutait du rap. Je suis une véritable éponge de culture contemporaine, mais mon enfance et mon éducation étaient tout aussi imprégnées de culture que ma vie actuelle. Par exemple, pour ceux qui faisaient du skate, le skate était illégal! Ce n’est bien entendu plus le cas, mais à l’époque, c’était une culture de niche qui rassemblait les jeunes de la Californie à New York.

Alors avec l’âge, on peut en quelque sorte oublier ce qui nous intéressait auparavant. Je n’adhère pas vraiment à cette théorie de créer pour quelqu’un de plus âgé que soi. Ça marche peut-être pour d’autres. Mais j’envisage les choses dans une perspective post-Internet: les jeunes qui ont cinq ans de moins aujourd’hui sont beaucoup plus matures que leurs prédécesseurs dans ce nouveau contexte.
So as you get older, you can kind of forget the things you were into. I’m not really a part of the theory of looking to five years older. That might work for other people. But the way I see it is, this is all post- “the internet.” Kids that are five years younger are now more mature than people who are five years older in this new context.

C’est vrai.

Ils sont plus ouverts d’esprit, ils ont voyagé davantage. Par exemple, comparez votre compte Facebook à votre compte Twitter. Votre liste d’amis Facebook est peuplée de gens plus âgés, qui ont un mode de vie différent. Et Twitter est rempli de jeunes qui s’expriment d’une façon plus actuelle. 2015 est un moment différent de tout ce qui a précédé, aussi cliché et ringard que cela puisse paraître. Quand on se remémorera l’époque actuelle, l’Internet et tout ça, il faut que ce soit comme d’une époque exceptionnelle.

C’est le but de beaucoup de marques de mode et d’œuvres d’art : capter l’air du temps.

Mon point de départ, la raison pour laquelle j’ai choisi le nom d’Off-White, c’est que c’est la couleur d’une toile brute. On peut peindre une toile de n’importe quelle couleur, mais la couleur de la toile elle-même est l’écru. Cela signifie que tout ce que je fais à travers la marque relève à un niveau ou un autre d’une démarche artistique, mais dont le support est la mode.

Quels sont vos projets pour le développement d’Off-White ? Sur quels autres formats aimeriez-vous travailler ?

En ce moment, je souhaite me concentrer sur certains projets déjà en cours. Je consacre beaucoup de temps aux meubles, et sur la création d’images pour les accompagner. L’aspect sur lequel je me concentre plus particulièrement est le lancement d’une maison d’édition. Je publie différents projets conçus entre les collections et autour de celles-ci, juste pour qu’il en existe un exemplaire physique – une représentation de cette réflexion. Parce que je découvre que le processus de créer des vêtements, de les montrer aux acheteurs, de les montrer aux journalistes, puis de passer à autre chose n’est pas aussi durable que je le souhaiterais. Je travaille sur certaines idées depuis mes premières collections, mais elles n’existent que dans ma tête! Alors je travaille sur quelques livres autour de quelques projets importants, pour ne pas aller trop vite.

Ce film est donc l’un de ces projets, qui documentent le processus de création de ces vêtements.

Et longtemps après avoir été vu pour la première fois, le film sera toujours sur Vimeo ou Youtube. Je trouve ça intéressant, qu’il puisse avoir une durée de vie plus longue que celle des vêtements.

Vous avez la copie digitale et la copie physique.

Exactement.

  • Film: Pierre Debusscher